France - Cons. Const. 7 décembre 2012, n°2012-286 QPC

French Commercial Courts no longer have the ability to decide of their own motion the opening of rehabilitation proceedings.
(Cons. Const. 7 décembre 2012, n°2012-286 QPC, ECLI:FR:CC:2012.286.QPC)
 
In a decision dated December 7, 2012, the French Constitutional Court (Conseil Constitutionnel) declared unconstitutional the first paragraph of the Article L. 631-5 of the French Commercial Code which allowed the French Commercial Courts to decide of their own motion the opening of a rehabilitation proceedings (procédure de redressement judiciaire) against a company in financial difficulty.
 
The Constitutional Court specifies that its decision is effective immediately and shall take effect on all the opening judgments rendered after this date. This means that the Commercial Court, seized on its own motion of request of the opening of a rehabilitation proceeding, shall declare such request nonsuited and dismiss it.
 
The Constitutional Court based its decision on the principle of impartiality, as defined by Article 16 of the Human and Citizen’s rights Declaration dated 20 and 26 August 1789[1] (Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen). For the Constitutional Court, the violation of this principle is due to the fact that Article L. 631-5 of the French Commercial Code allowed a Commercial Court to render a decision in a case introduced by such Court.
 
The decision amends substantially the French insolvency Law, insofar as this practice was quite common. A the date of this decision, the opening of a rehabilitation proceeding may be asked by (i) the company itself, (ii) the creditor of the company by  issuing a writ of summons to such company, and (iii) by the Ministère Public (i.e., French institution representing the interest of the society). In the future it is highly probable that more requests for the opening of a rehabilitation proceeding will be introduced the Ministère Public, due to the close ties between the latter and the Commercial Courts.
 
Catherine Ottaway / Maxime Coulon
HOCHE Société d’Avocats

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 octobre 2012 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 1085 du 16 octobre 2012), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, de questions prioritaires de constitutionnalité posées par la société Pyrénées services, la société Bois et services, la société CEF services, la société Data consulting, la société Engineering services, relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 631-5 du code de commerce.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code de commerce ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations produites pour les sociétés requérantes par Me Éric Marty-Etcheverry, avocat au barreau de Toulouse, enregistrées le 7 novembre 2012 ;

Vu les observations produites pour Me Olivier Benoît et Me Sébastien Vigreux, agissant ès qualités, respectivement, de mandataire judiciaire au redressement judiciaire et d'administrateur judiciaire des sociétés requérantes, par Me Frédéric Benoit-Palaysi, avocat au barreau de Toulouse, enregistrées le 21 novembre 2012 ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 8 novembre 2012 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

Me Marty-Etcheverry pour les sociétés requérantes, Me Benoit-Palaysi pour Mes Benoît et Vigreux et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 27 novembre 2012 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;


1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 631-5 du code de commerce : « Lorsqu'il n'y a pas de procédure de conciliation en cours, le tribunal peut également se saisir d'office ou être saisi sur requête du ministère public aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire » ;

 

  • « Sous cette même réserve, la procédure peut aussi être ouverte sur l'assignation d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance. Toutefois, lorsque le débiteur a cessé son activité professionnelle, cette assignation doit intervenir dans le délai d'un an à compter de :
  • « 1° La radiation du registre du commerce et des sociétés. S'il s'agit d'une personne morale, le délai court à compter de la radiation consécutive à la publication de la clôture des opérations de liquidation ;
  • « 2° La cessation de l'activité, s'il s'agit d'une personne exerçant une activité artisanale, d'un agriculteur ou d'une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;
  • « 3° La publication de l'achèvement de la liquidation, s'il s'agit d'une personne morale non soumise à l'immatriculation.
  • « En outre, la procédure ne peut être ouverte à l'égard d'un débiteur exerçant une activité agricole qui n'est pas constitué sous la forme d'une société commerciale que si le président du tribunal de grande instance a été saisi, préalablement à l'assignation, d'une demande tendant à la désignation d'un conciliateur présentée en application de l'article L. 351-2 du code rural et de la pêche maritime » ;


2. Considérant que, selon les sociétés requérantes, en permettant à la juridiction commerciale de se saisir d'office pour l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, ces dispositions méconnaissent les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;


3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « se saisir d'office ou » figurant au premier alinéa de l'article L. 631-5 du code de commerce ;


4. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; que le principe d'impartialité est indissociable de l'exercice de fonctions juridictionnelles ; qu'il en résulte qu'en principe une juridiction ne saurait disposer de la faculté d'introduire spontanément une instance au terme de laquelle elle prononce une décision revêtue de l'autorité de chose jugée ; que, si la Constitution ne confère pas à cette interdiction un caractère général et absolu, la saisine d'office d'une juridiction ne peut trouver de justification, lorsque la procédure n'a pas pour objet le prononcé de sanctions ayant le caractère d'une punition, qu'à la condition qu'elle soit fondée sur un motif d'intérêt général et que soient instituées par la loi des garanties propres à assurer le respect du principe d'impartialité ;


5. Considérant que la procédure de redressement judiciaire est ouverte à toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à tout agriculteur, à toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ainsi qu'à toute personne morale de droit privé, qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements ; que cette procédure est destinée à permettre la poursuite de l'activité du débiteur, le maintien de l'emploi dans l'entreprise et l'apurement du passif ;


6. Considérant que les dispositions contestées confient au tribunal la faculté de se saisir d'office aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, à l'exception du cas où, en application des articles L. 611-4 et suivants du code de commerce, une procédure de conciliation entre le débiteur et ses créanciers est en cours ; que ces dispositions permettent que, lorsque les conditions de son ouverture paraissent réunies, une procédure de redressement judiciaire ne soit pas retardée afin d'éviter l'aggravation irrémédiable de la situation de l'entreprise ; que, par suite, le législateur a poursuivi un motif d'intérêt général ;


7. Considérant, toutefois, que ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition ne fixent les garanties légales ayant pour objet d'assurer qu'en se saisissant d'office, le tribunal ne préjuge pas sa position lorsque, à l'issue de la procédure contradictoire, il sera appelé à statuer sur le fond du dossier au vu de l'ensemble des éléments versés au débat par les parties ; que, par suite, les dispositions contestées confiant au tribunal la faculté de se saisir d'office aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire méconnaissent les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; que, dès lors, les mots « se saisir d'office ou » figurant au premier alinéa de l'article L. 631-5 du code de commerce doivent être déclarés contraires à la Constitution ;


8. Considérant que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à tous les jugements d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire rendus postérieurement à cette date,
 


D É C I D E :

Article 1er.- Au premier alinéa de l'article L. 631-5 du code de commerce, les mots : « se saisir d'office ou » sont contraires à la Constitution.
 
Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées par son considérant 8.
 
Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
 
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 6 décembre 2012, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL, Nicolas SARKOZY et Pierre STEINMETZ.
 
Rendu public le 7 décembre 2012.
 
Journal officiel du 8 décembre 2012, p.19279 (@ 73)
ECLI:FR:CC:2012:2012.286.QPC
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